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les kolariens du bengale.

rables ? Défense d’en construire en pierres, ni à plusieurs étages, de les couvrir autrement qu’avec du chaume. On préférait qu’ils vagabondassent et n’eussent aucune attache au sol. Interdit d’avoir des vases entiers : il leur fallait se servir de tessons. Interdit de porter bijoux d’or ou d’argent, joyaux autres qu’en laiton, fer ou verre. Interdit aux femmes de se couvrir les seins, de porter souliers, de se donner le luxe d’un parasol, de laver leurs vêtements. Il leur était enjoint de vivre dans la malpropreté et l’infection[1]. Ordre aux hommes de vivre nus ; on ne leur permettait pour vêture que de la paille ou des guenilles, la fripe des morts et des loques laissées par les criminels qu’ils auraient exécutés. Ce dernier point doit être expliqué : les bourreaux et tortionnaires étant haïs et méprisés, on dévolut leur office aux basses castes. L’équarrisseur, le fossoyeur, l’écorcheur et l’exécuteur public furent réputés frères, et on leur donna pour fils ou neveux les mégissiers et tanneurs, les corroyeurs, selliers, cordonniers, tous de métier vil. On affectait de ne leur garantir aucune propriété, ne supposant pas qu’ils possédassent rien en propre, sinon par le vol et la filouterie. La loi condamnait au vagabondage tous ceux qu’elle n’attachait pas à la glèbe, leur interdisait l’approche des maisons honnêtes, le séjour dans les villes et les villages.

De ces prescriptions dictées par la haine, plusieurs, pensons-nous, n’ont jamais existé, n’ont été inventées qu’après coup. Nombre d’entre elles tombèrent en désuétude par la force des choses, par les invasions de plusieurs religions contraires au brahmanisme. Mais la plupart de ces ordonnances iniques entrèrent ou restèrent en

  1. Dubois, Mœurs de l’Inde.