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journal de la commune

on s’en serait passé — seraient réparties en même temps que les ordres du général. Mais quel général ?

Un général ? Oui dà ! Ces grands bébés de la Commune se sont bien souciés de stratégie. Ils ont appelé leurs bataillons : « Prenez vite vos fusils, avec ou sans poudre, ne prenez pas même le temps de les charger, et courez vite à Versailles par trois ou quatre chemins, courez, les lignards vous attendent pour se jeter dans vos bras. »

Je vais, je viens : impossible d’avoir des nouvelles.

Les forts de Vanves et d’Issy, qui nous appartiennent, tonnent toute la journée ; mais est-il sûr qu’ils puissent viser quoi que ce soit, et surtout ne pas toucher nos amis ?

« À la porte d’Issy, de nombreuses femmes attendaient, raconte le Mot d’ordre, je crois. » Elles étaient pâles mais fermes… La porte s’ouvre, le pont-levis se baisse, le tambour bat, le bataillon passe. Ces hommes barbouillés de poussière, les vêtements en lambeaux, s’avancent : « Vive la République ! » Ils disent : « Tout va bien ! » — Tout va-t-il bien ? Je ne sais… Beaucoup ont des cheveux blancs.

Les femmes se précipitent dans les rangs dès qu’elles voient ceux qu’elles aiment. Elles les couvrent de baisers et de pleurs. L’une ayant entraîné son mari, noir de poudre, l’officier vient le réclamer. « Oh ! soyez bien tranquille, dit la femme, je vous le rendrai tout à l’heure. »

Plus loin venaient les blessés… Nous voyons amputer un garde national. On jette son bras dans le fossé… » La colère répond à la provocation, la haine répond à la haine. Voici le décret dont on vient de placarder nos murailles :

« La commune de Paris,

« Considérant que les hommes du gouvernement de Versailles ont ordonné et commencé la guerre civile, attaqué Paris, tué et blessé des gardes nationaux, des soldats de la ligne, des femmes et des enfants ;

« Considérant que ce crime a été commis avec préméditation et guet-apens, contre tout droit et sans provocation,