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journal de la commune

concurrence de quinze cents millions, le Prussien reste le gendarme, le maître et l’arbitre de la France.

En retour de tant de soins et de sollicitude, les Allemands expulsés de France, même les espions les plus éhontés, seront réintégrés dans tous leurs biens, droits et demeures. Et la Prusse qui nous a massacrés sans pitié, sera dans toutes les relations commerciales traitée par nous comme la nation la plus favorisée.

Le Standard, journal anglais, ne comprend rien à ce traité. « il est évident, dit-il, que cette dernière transaction laisse la France dans une position plus désastreuse encore que celle où elle se trouvait aux préliminaires de Versailles. » En effet, je ne crois pas que l’histoire moderne fournisse l’exemple d’un traité de paix plus rigoureux dans sa rédaction définitive que dans sa rédaction préparatoire ; par courtoisie, par bon sens, par désir de conciliation, la forme première a toujours été adoucie, le vaincu a obtenu quelques concessions.

« Tout cela paraîtrait inexplicable, dit le Standard si on n’avait la clef de l’énigme : l’anxiété du Gouvernement de Versailles de maintenir son pouvoir. MM. Favre et Pouyer-Quertier se sont rendus à Francfort avec l’intention bien arrêtée de tout céder à M. de Bismarck, pourvu que celui-ci leur accordât, à titre de compensation, la permission de reconquérir Paris. Ils ont cédé tous les points disputés à la seule fin d’empêcher les Allemands de se jeter entre eux et l’objet de leur vengeance, Paris !

À Paris, nous disons aussi ce que dit le Standard : tout céder à M. de Bismarck pourvu qu’il leur accorde les moyens de reconquérir Paris. De fait il est inadmissible que « des habiles négociateurs » tels que MM. Thiers, Favre et Pouyer-Quertier, qui pouvaient s’en tenir aux stipulations des préliminaires de Versailles et ne pas en bouger d’une semelle, aient empiré de gaieté de cœur des conditions déjà si ruineuses, si meurtrières, si humiliantes. Avec ce qu’on donne en sus, il y a quelque stipulation en sus. M. de Bismarck a vendu, M. Thiers a acheté quelque infamie. Hélas ! nous la pressentons bien, cette infamie, et M. de Bismarck qui a solennellement déclaré qu’il n’interviendrait pas dans notre guerre civile, interviendra dans notre guerre civile. Autour de Paris, les armées s’étendent. L’armée de