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journal de la commune

insultes qu’on nous prodigue. Il y a une conspiration latente contre notre malheureuse commission, qui se fera peut-être regretter parce que nous cherchons à allier la modération avec l’énergie. Nous sommes pour les moyens révolutionnaires, mais nous voulons observer la forme, respecter la loi et l’opinion.

…S’il y a quelques discordes, n’est-ce point pour des querelles de galons ?… Pourquoi ces tiraillements, ces compétitions ? C’est l’élément militaire qui domine, et c’est l’élément civil qui devrait dominer toujours.

Pour moi, je suis décidé à rester à mon poste, et si nous ne voyons pas la victoire, nous ne serons pas les derniers à nous faire tuer sur les remparts ou sur les marches de l’Hôtel de Ville. »

Dimanche, 23 avril.

« — Monsieur le Président du Gouvernement, etc. Les services éminents du général Changarnier l’ont placé depuis longtemps au-dessus de toute récompense. Il me paraît utile cependant de donner aujourd’hui pour l’exemple à ce glorieux vétéran de notre armée un témoignage éclatant d’estime pour ses grands talents et ses hautes vertus militaires. — Je vous prie en conséquence de décider que M. le général Changarnier sera élevé à la dignité de Grand Croix de la Légion d’Honneur. Agréez, etc. Le Ministre de la Guerre, Leflô. Versailles, 20 avril.

— « Le chef du Pouvoir exécutif arrête : « Le Général de division Changarnier est élevé à la dignité de Grand Croix de la Légion d’Honneur. Signé : A. Thiers. »

— « À M. le Ministre de la Guerre : Mon cher et bon Leflô, l’idée de me donner la Grand Croix de la Légion d’Honneur n’est pas de vous. Mais je vous reconnais au préambule courtois du décret qui me concerne. Veuillez informer M. le Président du Conseil que je n’accepte pas la Grand Croix de la Légion d’Honneur, Agréez, etc. Signé : Changarnier. »

Et pas d’autre explication. Pourquoi cette raideur, ce refus sec à cette politesse qu’on ne fait guère qu’aux souverains, grands-ducs et maréchaux. Jamais commandeur de la noble Légion n’avait eu encore de scrupule à être nommé Grand Croix. Quel est donc le mystère ?