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l’homme et la terre. — inde

fallait que pour lui on oubliât Hercule et Bacchus, mais il ne réussit pas à se faire nommer par les orgueilleux brahmanes.

L’itinéraire suivi par le Macédonien dans son expédition de conquête prouve que toutes ces contrées montagneuses et difficiles, au nord et au sud du diaphragme de l’Asie, étaient fort bien connues. Alexandre s’y joue comme un enfant au milieu des arbres dans une partie de barres : il est vrai que la durée totale de son voyage de conquêtes, au nord et à l’orient de Persepolis, ne dura pas moins de sept années. Arrivé à la suite des fugitifs persans devant l’une des « Cent portes » caspiennes, il descendit dans les plaines du Touran pour suivre facilement au nord, soit la base, soit une longue vallée médiane des montagnes bordières de l’Iranie jusqu’à la brèche qui traverse la chaîne de part en part, là où se trouve l’une des « clefs du monde », la fameuse Herat, qu’il nomma à sa propre gloire Alexandria in Ariis. Puis, au lieu de se rendre directement à Bactres, où résidait son ennemi Bessus, le meurtrier de Darius et son successeur comme roi des Perses, Alexandre, assuré, semble-t-il, de sa victoire future, se dirige au sud pour revenir sur la Bactriane par un immense détour à travers la Drangiane et l’Arachosie. Prenant la route que tant d’autres conquérants ont suivie après lui, il descendit vers le territoire de bas-fonds et de lacs appelé aujourd’hui le Seistan et remonta au nord-est par la vallée de l’Etymander, le Hilmend, pour atteindre la base de l’Hindu-kuch dans la région de Kabul : c’est exactement la route que prit, dans la dernière guerre de l’Afghanistan, l’armée du général Roberts. Obligé d’attendre au pied des montagnes que le printemps eût fait fondre les neiges de l’hiver, Alexandre employa son temps à construire une de ces villes qu’il aimait tant à marquer de son nom : une Alexandria ad Caucasum s’éleva dans le voisinage de la ville actuelle de Kabul, en un point où viennent se rejoindre les sentiers descendus des principaux cols de la chaîne. Des ruines ont été désignées en plus d’un endroit comme les restes de l’antique cité[1] ; du reste, depuis que des peuples se meuvent à travers le diaphragme de l’Asie, un centre de population dut s’élever à cette rencontre des chemins.

Arrivé sur le versant septentrional de l’Hindu-kuch, probable-

  1. Wilson, Cunningham, Vivien de Saint-Martin, B. Haussoulier ; Bunbury, History of ancient Geography, passim.