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GÉOGRAPHIE.

Le Sébaou (110 kilomètres), abondant même en été, rassemble dans son lit capricieux les torrents septentrionaux du Jurjura, notamment l’oued des Aït-Aïssi et le Boukdoura, qui sont de vrais gaves. Il laisse à gauche, à une grande distance, à une grande hauteur, le Fort National (916 mètres), citadelle qui maintient les Berbères de ces monts, « épine dans l’œil de la Grande-Kabylie, » disent les Kabyles eux-mêmes ; puis il passe près de la ville de Tizi-Ouzou et va s’abîmer dans la Méditerranée à l’ouest de Dellis,

De Dellis à Bougie, la côte est déchirée, mais ses rentrants ne forment ni baies ni ports. On n’y rencontre que des criques serrées de près par des tamgouts de 800 à près de 1 300 mètres. En vue de la plus fière de ces aiguilles, haute de 1 278 mètres, près du cap Corbelin, au delà des ruines romaines de Zeffoun, on passe de la province d’Alger dans celle de Constantine.


Après le cap Sigli et le rocher qui se nomme île Pisan, un mont abrupt de 795 mètres, qui se rattache au Jurjura, le Gouraya, jette à la mer les trois promontoires du cap Carbon. En tournant ces pointes, on entire dans la baie de Bougie, ouverte de 42 kilomètres, du Carbon au Cavallo, et tracée en parfait arc de cercle. La cité dont elle tient son nom, Bougie, possède un excellent mouillage et une anse abritée dont il serait aisé de faire un très bon port, au bout d’une des meilleures vallées du Tell. Aussi n’est-ce point une fille du caprice ou du hasard, cette ville au site grandiose appuyée sur des monts magnifiques, cette Saldæ romaine, qui devint la capitale d’un empire berbère ; Bougie eut 100 000 âmes et pourra les ravoir ; mieux qu’Alger, elle semblait avoir dans son destin de régner un jour sur l’Atlantide. Le fleuve qui, près de là, se perd dans la mer se nomme Sahel ou Soummam.

Le Sahel ou Soummam, long de 200 kilomètres, ou peut-être un peu plus, doit au Dira ses premières fon-