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MORCEAUX CHOISIS ET PENSÉES

Quand Newton mit au jour cette grande pensée (l’attraction universelle) appuyée sur une géométrie neuve et sublime, l’astronomie changea de face, et les cieux parurent raconter pour la première fois la gloire de leur Auteur : cependant, la théorie n’avait pas rempli toute sa tâche, il s’en fallait bien ; des phénomènes importants lui échappaient ; d’étonnantes exceptions, des désordres inexplicables la troublaient ; la loi mal assurée semblait quelquefois se déconcerter et se contredire. Un siècle s’était écoulé depuis la publication des Principes mathématiques de la philosophie naturelle, et, dans ce siècle, plusieurs générations de grands géomètres, d’observateurs infatigables, avaient réuni leurs efforts gigantesques contre les difficultés, et ils n’avaient pu les vaincre toutes. Il y avait encore, il n’y a pas trente ans, des scandales dans le ciel ; il y avait des planètes réfractaires aux tables des astronomes. Bien plus, en promulguant la loi de gravitation, Newton avait douté qu’elle fût capable de porter ce poids du monde qu’il lui imposait ; il avait pensé qu’elle vieillirait comme les lois humaines, et qu’un jour viendrait, il l’a écrit, où il faudrait que la main du Créateur s’étendit pour remettre les choses en place.

Newton se trompait, Messieurs. Non, pour remettre le système en ordre, il ne sera pas besoin de la main du Créateur ; il suffira d’un autre Newton. M. Laplace est venu, et, par ses immenses travaux, par la puissance et les ressources de son génie, l’astronomie réduite à un problème de mécanique, ne découvre plus dans les cieux que l’accomplissement mathématique de lois