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nemens de la fortune & des atteintes du gouvernement ?

Dans les bois de l’Amérique, ſi la diſette règne au Nord, on dirige ſes courſes au Midi. Le vent ou le ſoleil mènent une peuplade errante aux climats les moins rigoureux. Entre les portes & les barrières qui ferment nos états policés, ſi la famine, ou la guerre, ou la peſte, répandent la mortalité dans l’enceinte d’un empire, c’eſt une priſon où l’on ne peut que périr dans les langueurs de la misère, ou dans les horreurs du carnage. L’homme qui s’y trouve né pour ſon malheur, s’y voit condamné à ſouffrir toutes les vexations, toutes les rigueurs que l’inclémence des ſaiſons & l’injuſtice des gouvernemens y peuvent exercer.

Dans nos campagnes, le colon ſerf de la glèbe, ou mercenaire libre, remue toute l’année des terres dont le ſol & le fruit ne lui appartiennent point, trop heureux quand ſes travaux aſſidus lui valent une portion des récoltes qu’il a ſemées. Obſervé, tourmenté par un propriétaire inquiet & dur, qui lui diſpute juſqu’à la paille où la fatigue va chercher un ſommeil court & troublé,