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Trop de ſcènes cruelles & deſtructives ont juſqu’ici affligé nos regards, pour qu’il ne nous ſoit pas permis de les arrêter un moment ſur des travaux inſpirés par l’humanité & dirigés par la bienfaiſance. Toutes les autres conquêtes ont été faites par les armes. Nous n’avons vu que des hommes qui égorgeoient des hommes ou qui les chargeoient de chaînes. Les contrées que nous avons parcourues ont été ſucceſſivement autant de théâtres de la perfidie, de la férocité, de la trahiſon, de l’avarice & de tous les crimes auxquels on eſt porté par la réunion & la violence des paſſions effrénées. Notre plume, ſans ceſſe trempée dans le ſang, n’a tracé que des lignes ſanglantes. La contrée où nous ſommes entrés eſt la ſeule que la raiſon ait conquis. Aſſeyons-nous & reſpirons. Que le ſpectacle de l’innocence & de la paix diſſipe les idées lugubres dont nous avons été juſqu’à préſent obsédés, & ſoulage un moment notre âme des ſentimens douloureux qui l’ont ſi conſtamment oppreſſée, flétrie, déchirée. Hélas ! la jouiſſance nouvelle que j’éprouve durera trop peu pour qu’elle me ſoit enviée. Lecteurs, bientôt ces grandes cataſtrophes