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commerce en apparence ſi avantageux, séduiſit à tel point les Eſpagnols, qu’ils permirent à ces républicains de bâtir ſur les côtes, des maiſons pour ſe loger, des magaſins pour la sûreté de leurs marchandiſes, des temples pour l’exercice de leur religion. Ces établiſſemens devinrent inſenſiblement des fortereſſes, dont une puiſſance plus rusée que guerrière profita, pour aſſervir des peuples crédules, toujours divisés entr’eux, toujours irréconciliables. En achetant les uns, en intimidant les autres, Carthage vint à bout de ſubjuguer l’Eſpagne, avec les ſoldats & les tréſors de l’Eſpagne même.

Les Carthaginois devenus les maîtres de la plus grande & de la plus précieuſe partie de cette belle contrée, parurent ignorer ou mépriſer les moyens d’y affermir leur domination. Au lieu de continuer à s’approprier pour des effets de peu de valeur, l’or & l’argent que fourniſſoient aux vaincus des mines abondantes, ils voulurent tout emporter de force. Cet eſprit de tyrannie paſſa de la république au général, à l’officier, au ſoldat, au négociant même. Une conduite ſi violente jeta les provinces ſoumiſes dans le