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Consul, que la vertu précède tes faisceaux.
Ce que je veux, ce sont les qualités de l’âme.
Est-ce le seul honneur qui te guide et t’enflamme ?
Es-tu de l’équité l’inflexible soutien ?
Je reconnais un grand. Salut, Émilien,
Ou Cossus, ou Caton ; salut, mortel illustre,
Dont Rome triomphante emprunte un nouveau lustre.
Je te vois, je t’accueille avec les mêmes cris
Que l’habitant du Nil retrouvant Osiris.
Mais j’appellerais noble un mortel méprisable
Qui n’a pour lui qu’un nom dont le fardeau l’accable !
Nous disons quelquefois d’un nain, c’est un Atlas ;
D’un enfant contrefait, c’est un nouvel Hylas ;
D’un chien maigre et pelé qui d’une lampe aride
Sans force, en se tramant, lèche le bec fétide,
C’est un tigre, un lion, un noble léopard,
Un animal plus fier, s’il en est quelque part.
Tremble que ne soit en ce sens ironique,
Qu’on te décore aussi du surnom de Crétique,
— A qui donc adressé-je une telle leçon ?
—A Blandus, qui du sang des Drusus, des Néron,
Nous vient avec orgueil relever l’avantage,
Comme si sa noblesse était son propre ouvrage ;
Comme si par lui seul il avait mérité
Qu’une fille des rois dans ses flancs l’ait porté,
Plutôt que d’être issu de l’obscure Romaine
Qui travaille en plein air à ses tissus de laine.
Vous autres, nous dit-il, jetés aux derniers rangs,
Vous qui ne pourriez pas nous nommer vos parents,
Vous n’êtes qu’une ignoble et vile populace.
Moi, l’antique Cécrops est l’auteur de ma race.
— Eh bien ! fils de Cécrops, triomphe et sois heureux ;
Triomphe d’être né d’un sang si généreux ;
Mais pourtant n’est-ce pas dans cette populace,
Que l’on voit tous les jours les gens de votre race,