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RAMSAY

d’un microscope. Toutefois il était facile de tenir compte de ses propriétés. L’émanation est comme l’eau, sans couleur, vue par lumière transmise ; vue par lumière réfléchie, elle rend le tube phosphorescent, et la couleur dépend de la nature du verre. Dans la silice, elle émet une lumière blanche ; dans le verre de soude, un éclat lilas ; dans le verre de potasse, la couleur est bleu vert. Lorsqu’on comprime l’émanation dans du verre de soude, la lumière rappelle la flamme du cyanogène, étant à la fois bleuâtre et rose.

En refroidissant ce gaz à −71°, il devient opaque ; il se solidifie. On remarque un changement de couleur frappant ; l’émanation solidifiée fait que le verre émet un éclat brillant, comme un petit arc électrique, d’un bleu d’acier. À une température plus basse encore, la couleur se change en jaune, et, dans l’air liquide, elle devient rouge orange. Lorsque la température remonte, on voit ces changements de couleur en ordre inverse. Quoique l’éclat en soit très intense, je ne serais pas disposé à croire que son usage peut faire une sérieuse concurrence aux moyens d’éclairage modernes.

Nous avons réussi à mesurer le volume de ce liquide rare, et sachant, comme on le verra plus tard, que la densité du gaz est de 112,5, on peut calculer la densité du liquide. Il est très lourd, 5,7 fois plus lourd que l’eau.

Jusqu’ici j’ai désigné ce gaz par le nom que lui ont attribué MM. Rutherford et Soddy. Mais, sans doute, il appartient à la série des gaz inactifs ; et il existe déjà trois émanations : celle du radium, celle du thorium et celle de l’actinium. L’expression « l’émanation du radium » est peu heureuse, et il fallait chercher un nom qui indiquât une des propriétés frappantes de ce gaz et qui en même temps rappelât ses congénères de la série de l’argon. Nous avons forgé le mot niton, qui signifie « luisant ». Il est vrai que nous n’avons pas écouté les scrupules des puristes, qui interdisent l’addition d’une terminaison grecque à un mot d’origine latine ; je m’excuse en vous rappelant que, parmi les Grecs, l’habitude d’adopter les mots latins était fort répandue ; ainsi nous rencontrons les mots : σουδὰριον, δηνἁριον, πραιτὼριον, κῆνσος et une foule d’autres.

M. Collie et moi, en 1904, nous avons réussi à mesurer les longueurs d’onde de quelques-unes des lignes spectrales du niton ; en collaboration avec M. Cameron, d’autres tentatives ont été faites ; M. Watson, dans mon laboratoire, a fait une complète étude de cette question, avec du niton purifié par moi. D’après M. Hicks, ce spectre