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nois. Ce que nous redoutons par dessus tout, ce sont les jugements absolus, qui tronquent la nature, créent des limites arbitraires, des barrières factices, et dérangent la belle harmonie de l’univers, laquelle est faite de nuances et de transitions. Les faits sont à nos yeux sacrés, par cela seul que ce sont des faits. Nous n’avons pas l’impertinente sagesse de les vouloir corriger ; nous les respectons et les étudions dans un esprit de calme observation, dont rien ne saurait nous faire dévier.

» Aussi voyez ce qui arrive. Pendant que vous perdez le temps à chercher un principe ou un guide qui vous permette de juger Aristophane et Molière, nous avons déjà compris Molière et Aristophane. L’histoire de la démocratie athénienne nous à expliqué pourquoi la comédie d’Aristophane fut avant tout une satire ; celle de la haute société française au XVIIe siècle nous a appris pourquoi Molière ne fut pas moins satirique, et la décadence de l’esprit chevaleresque nous donnerait de même la clef de Don Quichotte, Les grandes corruptions sociales enfantent toujours la grande satire. Mais elle change de forme selon les temps et les circonstances. Ce n’est pas nécessairement au théâtre qu’elle se produit avec le plus de franche énergie. Le premier des satiriques latins fut un historien, Tacite. Cette forme convenait mieux au génie grave et positif du peuple