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idées fort morales et peuvent parfaitement servir d’exemple aux fidèles.

D’ailleurs, Edmund Bertram proteste énergiquement contre les paroles de Mary Crawford : si la connaissance que son père lui réserve une cure avantageuse sur ses domaines a pu influencer légèrement sa détermination, ce n’est pas cette considération qui l’a décidé à se faire pasteur, et il se fait une très haute idée de son rôle.


— « Un pasteur ». dit-il, « peut ne pas occuper un rang élevé ni dans l’état ni dans les milieux mondains. Ce n’est pas à lui d’entraîner les foules ou de diriger la mode. Mais je ne peux appeler nulle une situation de première importance pour l’humanité considérée collectivement ou individuellement, dans sa vie terrestre et dans sa vie éternelle, dont l’objet est de veiller sur la religion et la morale, et par leur intermédiaire sur les mœurs mêmes du pays. On ne peut appeler rien une telle situation. Si l’homme qui la détient mérite cette qualification, c’est parce qu’il néglige ses devoirs, qu’il outrepasse sa juste importance, qu’il sort de son rôle, pour paraître ce qu’il ne doit pas paraître ».


On voit que si Jane Austen ridiculise la fatuité de Mr. Collins et se moque des prétentions de Mr. Elton, ses railleries s’attaquent à l’individu et non à la profession. Elle est au contraire très respectueuse de tout ce qui touche à la religion, très formaliste même, puisque le fait de voyager un dimanche lui paraît une faute assez grave chez un fiancé pour inspirer aux jeunes filles des craintes sérieuses sur sa moralité. À côté de cela, elle ne s’indigne nullement de voir un jeune pasteur pris de boisson, c’est là en effet, suivant les idées de l’époque, une des prérogatives masculines.

Elle passe assez facilement l’éponge sur les fautes de ses jeunes filles, lorsque leur enlèvement aboutit à un bon mariage en règle ; et la situation d’enfant naturel ne lui semble pas une honte si le père est titré ou riche. Des critiques modernes en sont choqués, et après avoir