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Valancourt ; mais bientôt, revenant à la crainte, il ne sentit plus que pour lui-même, et déplora l’horreur de la séparation. Sa voix et ses paroles étoient si passionnées, qu’Emilie ne pouvant plus contenir sa propre douleur, cessa de réprimer la sienne. Valancourt, dans ces déchiremens d’amour et de pitié, perdit le pouvoir et presque la volonté de maîtriser son agitation. Dans l’intervalle de ses soupirs convulsifs, il recueillit les larmes d’Emilie avec ses lèvres ; puis, il lui disoit avec cruauté, que jamais peut-être elle ne pleureroit plus pour lui. Il essaya ensuite de parler avec plus de calme, et ne put que s’écrier : Ô Emilie ! mon cœur se brisera. Je ne puis, je ne puis vous quitter. À présent je vous vois, a présent je vous tiens dans mes bras. Encore quelques momens, et ce ne sera plus qu’un songe : je regarderai, et je ne vous verrai point : j’essaierai de recueillir vos traits, et l’imagination affaiblira votre image ; j’écouterai vos accens, et ma mémoire même les taira, Je ne puis, non, je ne puis vous quitter. Pourquoi confierions-nous le bonheur de notre vie à la volonté de ceux qui n’ont pas le droit de le détruire, et qui ne peuvent y contribuer qu’en vous donnant à moi ? Ô Emilie ! osez vous fier à votre cœur ! osez