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cela, d’ailleurs, ne fait rien à la chose ; vous serez mariée demain, vous le savez, soit que vous le veuillez ou non : le comte ne veut pas être joué plus long-temps.

Emilie n’essaya point de répondre à cette singulière harangue ; elle en sentoit toute l’inutilité. Madame Montoni posa les présens du comte sur une table où Emilie s’appuyoit, et lui souhaita le bonsoir. Bonsoir, madame, dit Emilie, lorsque sa tante ferma la porte, et elle resta encore une fois, livrée à ses tristes réflexions. Elle fut pendant quelques momens si fort abîmée dans ses pensées, qu’elle ignoroit où elle étoit ; à la fin relevant sa tête, et regardant autour d’elle, l’obscurité et le silence de l’appartement la réveillèrent. Elle fixa ses yeux sur la porte par laquelle sa tante avoit disparu ; elle écoutoit attentivement, pour qu’un son quelconque relevât l’abattement affreux de ses esprits. Il étoit minuit passé, toute la maison étoit couchée, excepté le serviteur qui attendoit Montoni. Son esprit, long-temps accablé par les chagrins, céda alors à des terreurs imaginaires ; elle trembloit de considérer les ténèbres de la chambre spacieuse où elle étoit ; elle craignoit sans savoir pourquoi. Cet état dura si long-temps, qu’elle auroit appelé Annette,