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admirer la scène, et dans le feu d’un poétique enthousiasme, s’élancer sur quelque rocher. Mais quand elle songeoit ensuite au temps, à la distance qui devoient les séparer, quand elle pensoit que chacun de ses pas ajoutoit à cette distance, son cœur se déchiroit, et le paysage perdoit tout son charme.

Après avoir traversé la Novalèse, ils atteignirent, après le soleil couché, l’ancienne et petite ville de Suze, qui avoit autrefois gardé le passage des Alpes en Piémont. Depuis l’invention de l’artillerie, les hauteurs qui la commandent en ont rendu les fortifications inutiles ; mais au clair de la lune, ces hauteurs romantiques, la ville au-dessous, ses murailles, ses tours, les lumières qui en éclairoient une partie, formoient pour Emilie un tableau très-intéressant. On passa la nuit dans une auberge, qui n’offroit pas de grandes ressources ; mais l’appétit des voyageurs donnait une délicieuse saveur aux mets les plus grossiers, et la fatigue assuroit leur sommeil. Ce fut là qu’Emilie entendit le premier échantillon d’une musique italienne sur le territoire italien. Assise après souper, près d’une petite fenêtre ouverte, elle observoit l’effet du clair de lune sur les som-