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— Allons donc ! une grande dame, elle n’y pense déjà plus à votre colle, père Tranet.

— Et puis, je vais réussir, les matières premières ne sont pas chères… des vieilles peaux d’animaux, de l’essence de romarin…

— Vous me coupez l’appétit, grommela Rampon.

— Papa, tu as eu tort, répéta pour la dixième fois Louise, que le champagne ne parvenait pas à égayer.

— Tort ? Pourquoi, fifille ?… on n’emprunte qu’aux riches, tiens.

— Et si on ne leur rend pas ?

Le père Tranet avala sa tarte.

— Laisse donc, tu sais bien qu’elle ne les réclamera jamais… Ses frères sont derrière elle.

Louise prétexta la migraine et remonta dans sa chambre.

Vers neuf heures du soir, Rampon se querellait encore avec Tranet, tout en terminant le déjeuner au milieu d’un dîner plantureux. Maman Bartau versait son cassis à flots. Marie s’essuyait le front.

— Ils ont mangé pour un an, pensait la cuisinière hors d’elle.

Louise était couchée. Louis parlait de reconduire le papa Tranet qui voyait double.

— Il faut le garder, souffla Caroline à l’oreille de son fils.

— Non, il faut qu’il aille chez Mme Désambres… par reconnaissance, et nous devons le lui ramener.

— C’est dommage, il va gaspiller cet argent, — Que veux-tu ? son argent appartient à Mme Désambres.