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avoir le droit de vous trouver deux sots, et, pour ma récompense, on me fera jouer une valse de Chopin, pendant que vous vous jurerez une passion éternelle. Non, certes, je dînerai au restaurant et j’irai au théâtre… On donne Mignon ce soir ; j’adore Mignon !

— Madame… c’est que je crains qu’il ne soit pas aussi respectueux que la dernière fois… Vous savez qu’il veut toujours des choses…

— Tant pis… je ne me mêle pas de ces choses… vous êtes une femme, défendez-vous !

— Oh ! Marcelle, vous êtes bien méchante.

— Et vous bien ridicule, ma chère petite ! Vous adorez mon gredin de frère qui vous adore, et vous lui refusez le bonheur… ce n’est pas logique. Notez que je vous trouve aussi coupable en pensée qu’en action, Louise… Mais ce ne sont pas mes affaires. J’ai eu pitié de vous deux… je continuerai à servir dévotement vos jolies intrigues… Quant à me faire voir ces horreurs de près… jamais !

Louise éclata en sanglots.

— Vous me méprisez, madame ! Ah ! je suis bien tombée en effet. Je mérite vos reproches… seulement… je ne puis pas lutter contre ce sentiment… il est comme le bon Dieu pour moi…

— D’accord… vous l’adorez… c’est entendu… alors pourquoi lui refuser ce qu’il désire ?

Louise eut un élan de naïveté presque brutale.

— Est-ce qu’on couche avec le bon Dieu, madame ? s’écria-t-elle.

Marcelle Désambres se mordit les lèvres et se tut.

Vers cinq heures du soir, on envoya le valet de chambre rue de l’Intendance, pour annon-