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infinies et diaboliques qu’on éprouve à faire le mal quand on a lutté en vain contre d’horribles tentations.

— Tu ne bois pas ? demanda Louis poussant sa main inerte.

— Non, merci, je n’aime guère le cassis, tu sais !

— Pour plaire à maman, voyons ! et il appuyait sur ses doigts très lourdement.

Elle se révolta.

— Je te dis que non !

— Madame est peut-être souffrante ? objecta Marcel Carini ne la perdant plus de vue.

— Oh ! ma belle-fille est toujours souffrante, dit Caroline d’un ton amer.

Les deux artistes se levèrent. Hector se rangea du côté du mari, tandis que Marcel demeurait du côté de la femme. On sortit : le père Tranet portait la lampe pour éclairer la cour, maman Bartau reconduisait le docteur, et Marie, la bonne, se dirigeait vers la voûte pour ôter les barres. Louise se traîna aussi jusqu’à la porte de la salle. Il lui fallait passer près de lui, le frôler, s’arrêter…

— Madame, supplia le satan, se composant un visage anxieux, qu’avez-vous, de grâce !… Est-ce moi qui vous effraie, qui vous rends toute pâle comme si vous alliez mourir ?… Madame, je meurs moi-même… pardonnez-moi.

La voix était tellement douce qu’on eût dit la voix d’une femme. Louise dut marcher à sa gauche et il lui saisit les doigts, dans ce noir intense de la cour. Ah ! il n’appuyait pas, lui, il n’était pas brutal, ce prince charmant.