Page:Rachilde - Madame Adonis, 1929.djvu/115

Cette page n’a pas encore été corrigée

tons, témoignait par un ronron sonore que ce changement de domicile ne lui était pas trop désagréable.

— Mon Dieu ! madame, murmura doucement la jeune femme, en tirant une superbe aiguillée de laine bleue, ce n’est pas de ma faute. Mon mari n’a jamais voulu que je m’en aille ; et il a gardé papa pour me garder, parce qu’il m’aime, Louis.

— Il vous aime ! Est-ce que l’amour est une chose dont on doit s’occuper dans un ménage honnête, s’écria Caroline, cramoisie ? N’avez-vous pas le toupet aussi de prétendre que vous aimez un homme que vous avez laissé un mois tout seul ?

— Mais, madame, vous me défendiez d’entrer dans sa chambre, je me suis tenue dans la mienne. Au bout d’un mois, c’est lui qui est revenu et vous ne me reprocherez pas d’être allée l’en supplier.

— Ah ! vous avez des artifices, vous, belle hypocrite… Vous le mènerez loin si je n’y veille pas à chaque instant. Je vous souhaite un enfant qui vous ressemble pour que vous ne sachiez plus ourdir de pareille révolution… Et elle ajouta avec une méprisante ironie : Un enfant ! vous n’en ferez jamais. Dieu ne donne pas d’enfant aux femmes qui sont amoureuse » comme des chattes sur les toits.

Malgré sa gaieté intérieure, la jeune femme eut une larme dans les yeux.

— Espériez-vous m’en voir mettre au monde, madame, si nous avions toujours ainsi couché aux deux extrémités de la maison ? répondit-elle un peu agacée.