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froidement, que mon beau-père ne partira plus, je l’ai promis à Louisette, et je tiendrai ma parole.

Mme Bartau mère laissa tomber sa beurrée au milieu de sa tasse, le café au lait rejaillit de tous les côtés. Alors, maintenant, c’était mon beau-père et c’était Louisette.

— Voyons Louis, tu perds la tête… Un homme qui vient de faillir… et qui a inventé des machines ridicules. S’il faut être poli, gardons-le un jour, trois jours, une semaine, mais, après, qu’il aille chercher des brevets ailleurs.

— Maman, je vous demande pardon… j’ai promis.

Caroline se leva, majestueuse. Le vent de luxure resoufflait sous le mûrier social. Elle n’eut qu’un mot pour bien résumer cette horrible situation, et ce mot, elle le jeta au visage de Louis avec une certaine dignité :

— Libertin !

Puis elle se rendit d’un pas ferme à l’emmagasinement de leurs planches.

Le déjeuner se passa fort mal. M. Tranet mangeait comme quatre. Louise aussi, et Louis appela la bonne pour se faire monter une bouteille de vin de Joué. Caroline protesta.

— Est-ce que tu veux te griser ?

— Non, je veux boire à la santé du beau-père. Je me sens joyeux aujourd’hui, et quelques gouttes de plus ne nous tueront pas je suppose !

— Voilà qui est digne de ta générosité, mon gendre ! s’exclama le père Tranet, dont la physionomie s’épanouissait.

— Des orgies, quoi ! bougonna Caroline, furieuse.