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sur les meubles, les tableaux, les chevalets encombrés de soieries chatoyantes. Fanette, la petite chienne, se met debout pour avoir un os et dans le splendide désordre de l’atelier règne une heure de doux abandon, de pleine liberté qui fait de leur intérieur tout un poème d’intimités élégantes, ne sentant pas trop la bohème.

— Qu’as-tu fait, aujourd’hui, Michel ?

— J’ai ajusté et tiré moi-même ton dernier modèle : le sieur Yves de Pontcroix, qu’on attend à l’imprimerie Brès. Mâtin ! Quel coup de crayon tu as, quand tu te mêles de te payer la tête d’un type ! Sans blague, tu as eu grand tort de ne pas lui demander les mille balles de rigueur. Tu oublies la vie chère… et que tu me fais manger du perdreau, ce que je le pardonne, d’ailleurs, facilement.

— Pas moyen, Michel, de m’en sortir autrement, puisqu’il avait la singulière fantaisie de… m’acheter celles des autres.

— Tu n’as plus entendu parler de lui !

— Non. Je continue à l’ignorer absolument.

— Moi, je connais leur livre. C’est un tirage de luxe. Il y a des vues du front, des carcasses de chevaux très réussies, par Janou. C’est tout plein gai et ton bonhomme, en première page,