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Il y eut un lourd silence.

— Oui, dit-il de sa voix redevenue sourde, c’est bien l’écriture de votre frère !

— Vous avouez ?

— J’avoue quand il me plaît, madame, vous le savez bien.

Elle fut forcée de s’asseoir sur le divan ou elle parut si pâle, si morte, qu’il ne put s’empêcher de lui dire :

— Comme vous devez souffrir, Marie !

Elle ferma les yeux, mais ne pleura pas. Elle ne pouvait plus pleurer,

— Alors, fit-il d’un accent devenu subitement très doux, c’est pour cela que vous ne m’offriez plus vos lèvres ? Si je pouvais vous prouver que je n’ai pas tué votre frère, me les donneriez-vous encore ?

Elle répondit, tout bas, suffoquée par la passion qui débordait en elle :

— Oui.

Il prit sa main, y reglissa l’anneau d’or qui la refaisait sa prisonnière.

— Au revoir, Marie, dit-il reprenant son ton railleur et glacé d’homme du monde qui prend congé. Vous êtes fatiguée. Moi aussi… et nous avons toute la vie devant nous. À demain.