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qu’il y a ! Yves est-il venu ici, sans que je le sache… répondez !

Marie Faneau alla vers l’entrée de l’atelier pour s’assurer que personne ne pouvait les entendre. Elle revint à ce garçon, qui frissonnait malgré son flegme, et de ses lèvres séchées par une nuit de fièvre, elle proféra cette phrase brutalement :

— Je m’adresse, en effet, au médecin, qui, je l’espère, n’est pas le complice, s’il est l’ami, et qui a le devoir du secret professionnel : Yves de Pontcroix a tué mon frère.

Henri Duhat leva les deux poings, chancela :

— Vous êtes folle !

— Non. J’en ai la preuve, autant qu’une preuve morale puisse être admise en justice, car le bandit a pris toutes ses précautions pour établir son innocence, lui. Il s’est même battu en l’honneur de sa victime. C’est un crime bien fait.

Elle alla chercher, sur une étagère, derrière une petite statuette chinoise, une boîte de métal : c’étaient les Murratti’s.

Ils s’assirent tous les deux, se penchant sur cette chose banale, cette vignette coloriée, où souriait une jolie miss bien aguichante, fumant le mince rouleau à bout doré. Marie ouvrit la