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mon meilleur ami, qui m’a rendu d’inoubliables services. Nous sommes du même pays où ma famille fut, jadis, au service de la sienne. Moi, je ne suis pas envoûté, mais j’ai pour Yves un profond attachement. Je le plains beaucoup plus que je ne le blâme. Chacun entend sa vie d’amour à sa façon. J’ai du faire quelques observations à mon client, que j’ai soigné depuis la guerre pour ses fièvres, qui l’ont fait réformer sans aucun dommage, veuillez le croire, pour l’intégrité de ses mœurs ; mais il est évident qu’il est dangereux pour lui, sinon pour sa femme, de se marier. Vous êtes très intelligent, Michel, et vous cherchez à mieux connaître votre futur beau-frère, parce que vous n’avez jamais habité le même monde et qu’une barrière, en s’ouvrant, ne nivelle pas deux terrains. Ça n’est pas très grave. Laissez-moi remettre les choses au point, je vous en prie ! Lucienne Gerval a grand tort de continuer à se plaindre, surtout en face d’un mariage. Elle est toujours vierge, donc on ne lui a causé aucun préjudice. On lui a donné à elle et à sa famille tout ce qu’elle a exigé. On ne lui doit plus rien… puisqu’elle s’est laissé condamner pour chantage… alors ?