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à me mesurer avec lui au pistolet ou à l’épée, merci bien ! Il en est à son cinquième duel, et Janou, le dessinateur qui fréquente les salles d’armes, prétend qu’on ne la lui fait pas à ce jeu-là. C’est un friand de la lame, comme ils disent dans leur vieil argot. Il va à la Grande Roue pour un oui et pour un non. Le bruit court que ça l’amuse et que les questions d’honneur ne sont pas les principales pour lui. Rien ne transpire de ces légendes, car plus il y a de légendes et moins on débrouille la vérité. Il y a surtout, hélas ! l’argent, sa très réelle fortune qui lui permet d’étouffer tous les scandales, de payer tous les dommages et de passer haut la tête dans un monde chic où le plus riche est toujours le plus libre. Ajoute à cela qu’il est un authentique aristocrate et qu’en France, à Paris, en pleine République vénale, on a le respect de ces nobles, qui font sourire dans la purée, parce qu’ils ne savent rien fiche, mais qui reprennent tout leur prestige dès qu’ils ne tripotent que leurs cartes ou leur politique. Il va donc s’offrir la grande ouvrière que tu es pour l’unique plaisir, bien sadique, de lui casser, moralement, les deux bras.

Marie Faneau songeait, ne pleurant plus.