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douche après laquelle il buvait un verre de vin bouillant qui le remettait à neuf d’une manière étonnante, et vers dix heures il se sauvait, on ne s’imaginait pas où, toujours chassant la jupe. Paul Richard eut des doutes au sujet de son appétit féroce, il l’avait connu très réservé dans ses noces, se vantant de rester correct durant les plus bruyantes orgies. Mary, une nuit de bal masqué, mena son amant dans un salon dont la porte s’ouvrait devant une pièce de vingt francs : là elle lui indiqua le baron, vautré sur un canapé en compagnie de créatures un peu ivres, qui cependant lui résistaient tant il se montrait cynique.

— Oh ! misérables que nous sommes ! murmura le jeune homme, songeant que le père ainsi que le fils assouvissaient leurs passions avec l’or de sa bourse.

— Allons donc ! répliqua-t-elle, cela, je le veux ! Rappelle-toi que je voudrai toujours ce qui m’arrivera, je suis la maîtresse de vos destinées ; et quand je ne t’aimerai plus tu regretteras mon amour comme bientôt il regrettera la vie ! Vous n’êtes pas malheureux, vous, les inconscients. Vous n’avez qu’à vous laisser diriger le premier vers un lit, le second vers la tombe, et c’est moi qui ai tout le mal !

— Crois-tu qu’il se tuera ?

— Je l’espère bien, Paul !

— Tais-toi, Mary, balbutia-t-il, effrayé de son regard cruel. C’est lâche d’attendre l’agonie d’un homme qui m’a fait grâce…