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sombre, et les globes de gaz étaient restés allumés au plafond du corridor ; les domestiques bâillaient, un lourd ennui planait sur la maison. Quelqu’un sonna à la porte du perron ; c’était le savant à l’oursin, le dernier fidèle, qui demandait le professeur Barbe pour une commission urgente. La femme de chambre, un peu maussade, car elle avait attendu sa maîtresse toute la nuit, le bouscula dans l’escalier.

Est-ce que monsieur avait le temps ? Il détestait les visites ! Si jadis il avait eu des réunions, aujourd’hui il ne voulait plus voir personne… Il tombait en enfance, elle servait la baronne de Caumont à la condition de ne pas servir M. Barbe, un gâteux insupportable. Tout tremblant, le vieux naturaliste expliquait à la jolie fille de mauvaise humeur, qu’il fallait absolument qu’il eût un entretien avec son camarade de collège.

— Oui ! Mademoiselle, ajoutait-il, s’entêtant à pénétrer jusqu’à cette lumière qu’on lui cachait depuis un an, mon camarade de collège ! Les autres sont des égoïstes qui ont la célébrité pour les consoler, mais moi je n’ai que son amitié… Mademoiselle, il a classé mon oursin dans son article… Comprenez-vous ? Un oriolampas !… un oursin unique ! et vous croyez que je peux vivre sans le remercier ! Il s’est souvenu de mon oriolampas ! Je le verrai, Mademoiselle… En usez-vous ?

Faisant un effort de galanterie, il lui tendait sa tabatière.