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— Le misérable ! rugit-il, visant ce tas de chairs sans défense.

— Ne tirez pas, Louis ! dit-elle, se traînant à genoux, c’est moi qu’il faut tuer à présent.

M. de Caumont laissa glisser le revolver, sa main eut un intraduisible geste d’effroi.

— Comment, lui ?

Et il ajouta pendant que Richard, prêt à mourir, s’accroupissait passivement sur les fourrures neigeuses :

— L’amant… c’est mon fils ! ! !…

Il avait eu un trouble en entrant, voulant d’abord tuer l’homme nu qu’il ne croyait pas nécessaire de connaître, puis il voyait son fils, beau comme un dieu, son fils de l’adultère ! Paul foudroyé crut sentir une balle au cœur et s’évanouit.

Mary rattachait les rubans de son peignoir.

— Eh bien ! oui, avoua-t-elle, je voulais me venger ! Puis, il me plaisait. Vous m’aviez appelée courtisane. Je voulais mériter amplement cette injure et vous faire tuer votre fils. Pourquoi m’avez-vous livré le testament un soir que vous disiez m’adorer trop pour me vouloir cacher quelque chose ? Vous y parliez d’assassinat. Je voulais vous prouver que je raisonnais mieux que vous. Le vulgaire supplice que de vous empoisonner ! Le testament détruit, je savais quand même que vous aviez un fils naturel, Paul Richard, à qui vous léguiez votre fortune personnelle, moi refusant de vous donner des enfants. Mais je ne pensais pas aller si loin.