Page:Rachilde - La Marquise de Sade, 1887.djvu/321

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Tu es bonne quand même ! soupirait Paul Richard alangui par son regard magnétique.

— C’est si charmant de le tromper sans te permettre d’aller plus loin !

Elle savourait ces voluptés comme les chattes savourent le lait, la paupière mi-close et la griffe en arrêt, heureuse mais n’attendant qu’un prétexte pour lancer l’égratignure. Lui songeait souvent qu’elle finirait par user sa cruauté à ces jeux-là. Il espérait une faiblesse, un cri, une larme de pitié, alors il se saoulerait de la victoire pour oublier remords et martyre. Oh ! il l’aimerait tant en une seule nuit d’abandon qu’elle comprendrait enfin que le plaisir c’est d’être doucement naïf, non de torturer une pauvre chair innocente.

— Richard, lui dit une fois le docteur Barbe, vous êtes pâle depuis un mois, je vous trouve l’aspect fiévreux, les pupilles dilatées. Vous travaillez trop, mon garçon.

Et, ce disant, le professeur offrit une petite enveloppe blanche à son élève, elle contenait cinquante francs. Paul hocha la tête :

— Merci, cher maître ; seulement je n’ai pas besoin de courir le guilledou, je vous assure, je suis triste, ça se passera !

— Hum ! vous mentez, Paul, et j’avertirai le baron. Mon neveu s’intéresse toujours à vous, il aura peut-être la chance de vous tirer des confidences.

— Je ne crois pas ! riposta le jeune homme avec un geste de colère.