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pour lui, le baron payait ses inscriptions, M. Barbe lui glissait de petites bourses ou récompenses du professeur à l’élève. Une fois, avec 27 francs, il avait eu une jolie fillette du boulevard Saint-Michel, pas fière, sachant son métier et qui lui avait déclaré qu’il marquait bien pour un étudiant campagnard. Avaient-ils assez ri tous les deux de son nom de Richard, alors qu’il se trouvait si pauvre en pleine vie luxueuse, à Paris ! Il pensait à la fillette, ce matin-là, mais comme elle était vulgaire !

Mon Dieu, elle valait ses 27 francs, pas un centime de plus. Elle s’était moquée de ses saignements de nez périodiques avec des plaisanteries dégoûtantes, et un jour, au lieu d’aller la retrouver au jardin de Cluny, il l’avait lâchée pour se souvenir d’une robe verte, demeurée au fond de son cerveau, dans un éblouissement de féerie. La fillette, pourtant, représentait une femme possible, tandis que cette robe !… Paul, la tête pesante — il faisait chaud — recula le livre. Soudain, il entendit retentir le timbre de la porte d’en-bas, il n’y avait personne, le docteur reposait et il grognait quand on dérangeait sa sieste. Paul descendit rapidement l’escalier en arrangeant le col de sa chemise.

— Madame la baronne ! murmura-t-il effrayé.

C’était elle qu’on croyait à Bade avec son mari et qui revenait au mois d’août, la mine mécontente, dans une avalanche de malles.

— Payez le cocher, dit-elle, lui lançant sa bourse, je n’ai pas le temps.