Page:Rachilde - La Marquise de Sade, 1887.djvu/287

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pour oublier les scandales de son frère qu’elle n’appelait plus que le vieux, tout court. Mary l’excitait, lui laissant rabâcher leur malheur à son aise. Aux repas, dès qu’il ouvrait la bouche, on lui rappelait ses faiblesses par des allusions tellement transparentes qu’elles devenaient odieuses. Durant ses cours à l’École de médecine, il lui arrivait de se tourner d’un air anxieux pour s’assurer si Tulotte n’allait pas entrer ivre et lui reprochant de vouloir violer sa nièce.

Il finit par s’estimer très heureux de déménager du premier étage pour s’installer dans leur ancienne mansarde, très vaste, très nue, solitaire comme le haut d’une église.

Là, du moins, il ne les rencontrait plus avec leurs yeux brillants de haine. Mary renvoya le valet Charles et mit la cuisinière au pas. Un jardinier traça des ronds et des ovales dans le jardin botanique dont on jeta les herbes au fumier.

Le fiancé venait tous les jours apportant des bouquets blancs ; alors le docteur descendait, se composant un visage impénétrable, souriant à ses nouvelles mondaines : c’était l’heure de la comédie paternelle.

Mary, entre eux, surveillait les mots et les gestes, déployant une grâce merveilleuse pour l’homme qui la posséderait bientôt.

Célestin, le dos voûté, les doigts tremblants, les écoutait avec un regard humide.

— Est-elle adorable, cette enfant ! murmurait le