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aussi des arguments pour sortir au soleil quand elle avait mis le savant de bonne humeur.

Tulotte bénissait ce regain d’étude ; la vieille fille passait quelques moments heureux dans des dîners plus fins, arrosés des vins qu’elle préférait, entre la nièce et l’oncle désormais réconciliés, point gourmands, lui abandonnant les meilleurs plats.

Une maladie de Mary vint augmenter l’intérêt de M. Barbe pour la jeune fille. Un été, elle eut la petite vérole. Laissant subitement ses cours et ses études, il demeura près de la patiente comme une mère. Peut-être bien ne fût-il pas tendre, il s’offrit même certaines expériences in animâ vili qu’il n’aurait pas osé risquer sur le corps de ses clientes de jadis, mais enfin il la sauva, et quand il fallut préserver le charmant épiderme d’une grossière flétrissure, il accomplit des miracles à l’aide d’un masque de caoutchouc rose point désagréable à voir dont il avait fait un chef-d’œuvre. Durant la convalescence, il la promena dans le jardin où il planta des rosiers en fleurs, parce qu’elle répétait toujours qu’elle préférait les roses à la plus belle herbe médicinale. Ils s’asseyaient tous les deux sur le banc de pierre, s’entourant de livres, avec Tulotte, au coin du paysage, tricotant une couverture de coton extrêmement compliquée. On échangeait des propos du genre de ceux-ci :

— Pensez-vous, mon cher oncle, que lors des époques tertiaires les arbres eussent la forme du palmier ou celle du chou ?