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Cet événement fit un bruit de tous les diables. Les journaux belliqueux le commentaient de cent façons. L’un déclarait que le sous-préfet avait été plein de noblesse ; l’autre ne savait trop louer la délicate attention de l’officier qui n’oubliait pas de se découvrir, malgré le danger, en présence d’une cérémonie religieuse ; celui-ci ajoutait que les deux dames se portaient mieux ; celui-là insinuait que le courage des hussards était proverbial. On en causa tellement qu’un beau jour le sous-préfet dit à Zaruski, devenu son inséparable depuis l’aventure :

— Pourquoi ne ferions-nous pas un carrousel ? Notre ville aime tant les distractions militaires ?

Il serait peut-être bien difficile d’établir la relation qui existe entre la fin d’un chien atteint d’hydrophobie et le commencement d’un projet de carrousel ; pourtant la phrase du sous-préfet jaillissait d’une discussion au sujet de la rage, voilà le fait.

Tout de suite on alla trouver le colonel Barbe et le commandant du dépôt des chasseurs qui se trouvaient aussi à Joigny. Le colonel se caressa la barbiche. En effet, il y avait de quoi faire un joli carrousel, là, du côté des promenades, près de la rivière ; on demanderait l’autorisation à la municipalité. Les femmes des notables s’en mêlèrent ; on discuta la chose pendant une semaine, puis il fut arrêté que ledit carrousel coïnciderait avec la fête de la ville. Une noce complète de hussards fraternisant avec les Bourguignons.

Le plan du combat, dû, en partie, à l’imagination