Page:Rachilde - La Marquise de Sade, 1887.djvu/183

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nel était fait surtout d’un paroxysme de colère qui devait influer sur toute sa vie. Il lui semblait que quelque chose de volontaire s’était mêlé à toute cette sombre histoire. Une nourrice ne s’endort pas sur un enfant sans être obligée de se réveiller au premier tressaut ! et lui, qui ne savait pas que l’on s’était grisé après le punch, dans ses propres cuisines, il accusait un inconnu quelconque de lui avoir tué son fils !

Mary n’essayait plus de le consoler, elle pleurait d’ailleurs de voir tout le monde pleurer et parce que ces cérémonies lui rappelaient l’enterrement de sa mère.

L’hiver se termina dans un chagrin sombre.

Madame Corcette avait reçu la défense de s’occuper des catéchismes de Mary et c’était Tulotte qui conduisait à présent la petite fille au village de Sainte-Colombe.

Mary se confessait régulièrement tous les mois. Jamais l’idée ne lui vint de dire au prêtre de quelle façon Célestin avait expiré. D’allures assez indolentes, en fait de dévotion, Mary attendait qu’on la questionnât : elle répondait non ou oui et elle s’accusait elle-même quand elle se sentait des remords, mais elle ne regrettait nullement le départ de Célestin. Au contraire, elle pouvait mieux dormir et on ne la battait presque plus ; si son père ne lui souriait pas davantage, au moins elle n’entendait plus ses perpétuelles comparaisons entre la beauté de Célestin et son détestable caractère. Elle ne demandait pas beaucoup, cette petite fille tranquille. Elle voulait