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geait dans d’innocentes extases qui lui donnaient des frissons de fièvre, elle ne savait plus si elle venait d’apprendre aussi son catéchisme et elle faisait des réflexions étonnantes :

— Donc c’est le Saint-Esprit qui a fabriqué le petit Jésus… Et qu’est-ce qu’il te raconte de saint Joseph, ton curé… il ne le plaint pas un peu ?

— Non, répliquait Mary, c’est la Sainte Vierge qui a mis au monde Notre-Seigneur Jésus… Le Saint-Esprit et saint Joseph n’ont rien fait, eux… Ah ! il était bien heureux d’avoir une maman sans papa ! ajoutait la fillette, l’œil assombri.

— Mais pourquoi que ces curés peuvent vivre tout seuls ! soupirait madame Corcette, ne voulant certes pas blesser son élève, mais gardant malgré la sainteté de sa mission on ne savait quel parfum des œuvres de Satan.

Et quand Mary lui faisait le récit d’un miracle, dans sa stupeur de nouvelle initiée, brusquement madame Corcette allongeait un coup de fouet à ses chevaux en déclarant « que cette blague-là était trop forte ! Non, elle ne pouvait pas avaler une pilule de cette grosseur ! Pauvre petite… comme on se moquait d’elle ! Ça faisait pitié ! »… Heureusement que l’église était bien située, assez loin de la ville pour éviter de fâcheuses rencontres et assez près du terrain de manœuvre pour que les occasions…

— Dis donc, Mary, déclarait-elle en arrivant au chalet, redevenue sérieuse, nous y retournerons dimanche prochain, c’est entendu !