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siers taillés en boule comme des pommes ; à droite de la corbeille, sur une boule plus petite, d’un vert jaune, ressemblant un peu à un chou bien mûr, un bouton de rose, à peine sorti de sa gaine verte, s’ouvrait dans l’atmosphère tiède.

Au centre du jardin était un petit lac d’eau pure venue du Rhône. Quatre corbeilles aux quatre coins du lac contenaient les plants les plus précieux, ceux qu’on visitait feuille à feuille tous les matins, puis, autour de la pelouse nette et drue, s’élançait la forêt des rosiers plus communs, les buissons de roses-noisette vert foncé, sans trop d’épines, étoilés de roses blanches ; l’églantier de Virginie, aux fleurs simples rose chair, montrant dans une corolle très large, peu odorante, leur pistil plein de pollen ; le rosier de Jacob, tout un arbuste à branches retombantes, orné de fleurs d’un jaune intense ; le rosier de Bengale, entièrement rose, ruisselant de fleurs légères comme des fleurs de soie ; le rosier du Salut, traînant et rampant sur des tonnelles, jetant partout des poignées de roses rouges, petites, pressées, en grappes ayant la senteur forte du girofle ; le rosier de la Chine, un arbre gros comme le bras, très droit, très haut, portant six ou sept fleurs énormes d’un jaune foncé strié de rouge ; le rosier serpent, qui s’enroule autour d’un tuteur trois ou cinq fois, toujours couvert de boutons qui avortent mais embaument ; le rosier de Provins, agreste, aux feuilles rugueuses, à la fleur mal tournée, d’un rose intense, et si parfumée qu’on la choisit pour faire le vinaigre de rose ; le rosier pompon, rempli de petites