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avait grandi, sa taille sortait un peu des hanches qu’on pouvait deviner déjà rondes. Les jambes imitaient les nattes, elles s’allongeaient, élégantes. Ce n’était pas une jolie enfant selon les règles ordinaires de la plastique, mais elle était curieuse à voir.

Au bout du sentier, Mary s’arrêta devant un trou de haie ; une planche jetée sur le fossé permettait de passer par le trou, et l’on sautait chez un horticulteur, M. Brifaut, un brave homme, espèce de philosophe qui, retiré du monde, greffait des rosiers pour en obtenir des produits miraculeux.

Son jardin, la véritable vallée des roses, s’entourait d’une triple haie de sureau formant un mur, et des treillages de fil de fer soigneusement peints en vert attrapaient les voleurs quand ils s’aventuraient. M. Brifaut ne voulait point mettre ses roses dans une prison, il avait horreur des tessons de bouteilles et il lui semblait que l’air ne jouait jamais assez librement autour de ses plantations.

Mary, une fois dans le jardin, appela Castor ; le chien, sachant qu’il lui fallait être respectueux, se coucha près du trou, attendant le bon plaisir de sa maîtresse. Presque aussitôt un garçonnet de douze ans, habillé de toile bise, à la diable, un vieux paillasson de chapeau sur la tête, vint au-devant de Mary.

— Mademoiselle, cria-t-il avec une joie qui lui sortait de ses beaux yeux, je crois que notre Émotion est sur le point de faire des siennes !…