Page:Rachilde - La Marquise de Sade, 1887.djvu/116

Cette page a été validée par deux contributeurs.

visage affreusement blêmi, un large crêpe noué à son bras ; il avait les yeux secs, mais ses moustaches tremblaient. Un peu plus loin, assis au fond des fauteuils de la reine Berthe, les parents de madame Barbe, une vieille femme toute timide et un vieil homme empêtré dans une redingote trop longue, sanglotaient, la figure cachée dans leurs mouchoirs.

Madame Corcette se précipita au pied de ce lit avec un mouvement théâtral, ses sanglots éclatèrent comme une fanfare. Mary, pétrifiée, restait clouée à sa place, le regard affolé, ne sachant plus ce qu’on lui voulait. Un homme de très haute stature sortit d’un groupe ; il était chauve, d’un visage clair et froid dans lequel brillaient des yeux métalliques ; il poussa doucement la petite sur l’amoncellement des bouquets.

— Il faut embrasser ta mère, mon enfant, dit-il.

C’était l’oncle Antoine-Célestin Barbe.

Sans doute, qu’elle voulait embrasser sa mère… Mais où se cachait le frère attendu ? Pourquoi pleurait-on ? Pourquoi ces grandes bougies fumantes et toutes ces fleurs ?

Elle s’approcha du lit, monta sur un tabouret pour atteindre les mousselines qu’elle écarta de ses doigts anxieux. La face de sa mère se détachait d’un oreiller de satin lilas aussi blanche que de la neige, ses paupières closes allongeaient leurs cils comme des traits de plume sur un parchemin, et la bouche, dont les coins s’abaissaient, dans une expression de