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qu’il lui avait d’abord arrachée et l’en frappa au crâne. Le vieux tomba évanoui. On accourut de tous les côtés. Ronsin fut mandé, cela prit des proportions héroïques. Jamais Ronsin, le banquier, n’oublierait cette scène… jamais !… Les agents de police faisant une entrée bruyante, ce voleur maigre et pâle, étendu, comme mort, les doigts encore crispés sur sa poitrine, le coffre béant, une liasse éparpillée, les meubles renversés par la lutte, et ce robuste garçon, haut en couleur, brandissant le terrible instrument avec des yeux pleins d’éclairs. En vérité, Soirès avait sauvé non seulement la caisse, mais aussi l’honneur de la maison Ronsin et Cie.

Le vieux n’eut que six mois de prison.

Pendant ce temps, Fanny, qui avait réellement besoin de soins, tout en demeurant assez jolie femme, devint la maîtresse de Soirès.

La fille d’un voleur n’est pas responsable des fautes de son père !

À trente ans, Soirès, associé de Ronsin, eut ses grandes entrées dans les salons de la finance et fut désormais à même de gérer les capitaux d’autrui. Il retourna chez son député de la gauche qui s’appelait à présent Monsieur le Ministre, lui parla de projets commerciaux qu’il couvait, et par le récit du fameux coup de pince-monseigneur, raconté à sa manière, il réussit à étourdir complètement l’ancien ami de Mlle Mélida. La banque Soirès et Cie succéda aux Ronsin, rue de Trévise. Jean était riche. Il alla dans le monde, point parce que sa richesse lui