Page:Rachilde - À mort, 1886.djvu/148

Cette page n’a pas encore été corrigée

battons-nous demain jusqu’à ce que je vous tue ; il me suffit de savoir que vous l’aimez pour la trouver coupable. Sinon, ne la revoyez jamais… à moins que, l’ayant guérie de ses idées maladives, je vous rappelle pour ma propre satisfaction, car je ne suis pas assez bête pour vous haïr sans motif… ce serait de l’envie… »

Maxime avait écouté avec une attention soutenue le discours rageur de ce singulier mari qui osait discuter des choses frisant le ridicule.

— Monsieur Soirès, je vous admire !… dit-il d’un ton plein de douceur.

— Et vous me plaignez ? gronda Soirès resserrant les poings.

— Je vous demanderai ce que vous entendez par les idées maladives de madame Soirès ?

Ce coup droit ne fit qu’effleurer le banquier.

— Je vous crois, Monsieur, un être fort dangereux, dit-il, essayant de sourire, et toute ma vanité d’esprit ne pourrait lutter contre vos théories de… 1830… Je ne suis pas un viveur de votre genre, mais je suis assez viveur pour me défier des rendez-vous poétiques… donnés dans la lune ou ailleurs.

— À merveille, mon cher Soirès, traitons la question froidement. Vous ne m’accusez pas d’aimer madame Soirès… Vous supposez que madame Soirès est capable de m’aimer, hein ?

Soirès recula frémissant. Deux grosses larmes surgirent de ses yeux ; son teint, ordinairement très chaud, se décolora.