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Tout à coup, près d’un rideau de velours qui masquait une glace mobile, elle demeura comme pétrifiée : cette glace n’était que poussée contre son cadre et on entendait derrière un bruit de voix…

Or, madame Soirès avait reconnu la voix de son mari.

Il y avait longtemps que le banquier était là, arpentant le salon du comte de son pas précipité, le verbe haut, le geste furieux. Maxime, très maître de lui, se tenait adossé à la cheminée, remontant quelquefois l’abat-jour de la lampe pour suivre le chemin que faisait Soirès sur le tapis. Lorsque son domestique lui avait annoncé une visite, Maxime avait d’abord Consulté la pendule, puis pensant qu’il pouvait être poli, il avait laissé pénétrer ce malencontreux.

— Vous, Soirès ! dit-il saisi d’un frisson qu’il ne put dissimuler complètement.

― Oui, moi… cela vous étonne ?…

Le banquier avait le visage fiévreux, l’œil injecté ; la main qui tenait son chapeau tremblait visiblement.

Un instant les deux hommes se mesurèrent du regard.

Le comte avança un siège. Il murmura, souriant :

— Je suis charmé, mon ami ; vous venez sans doute pour me conduire au Cercle, mais je n’irai pas ce soir, je vous préviens, et si vous désirez passer une nuit loin de madame Soirès, je vous garde… très volontiers.