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mentent. Elles sont vieilles et ne pensent pas un seul mot de ce qu’elles me disent !…

Maxime étouffa son envie de rire.

— Ces tissus sont écrasants pour votre jeunesse, Madame, daigna-t-il remarquer. Il fallait vous mettre en rose blanche.

— Vous rêvez ; en rose blanche, moi ! Alors, Monsieur, lui répondit Berthe essayant de le regarder en face, je n’aurais pas été déguisée du tout.

Quand le bal s’ouvrit, ils se rencontrèrent encore dans une embrasure, sur le même sopha. Elle avait déjà dansé le premier quadrille, vis-à-vis d’une reine de Saba et d’un prince roumain. Des branches d’azalées entouraient sa tête blonde ; sa chemisette de mousseline des Indes, un peu écartée au creux des seins, laissait deviner les mouvements du cœur ; par instants elle avançait son pied microscopique chaussé de la mule traditionnelle. Ses yeux soutenaient courageusement l’éclat terrible des lustres, sa jolie bouche se crispait dans un rire muet ravissant.

Elle était bien bayadère, ainsi, et provocante selon son rôle. Cependant, la pauvre enfant ressentait, à la nuque, une douleur intolérable.

— Désirez-vous que j’aille vous chercher une glace ? lui demanda cérémonieusement de Bryon.

— Merci, comte, je n’ai besoin de rien.

Elle disait « comte » tout court, cherchant l’intonation particulière que mettait dans ce mot la princesse de R … lorsqu’elle s’adressait au jeune homme.