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Les dieux mesmes qu’ils ont servis
N’ont plus de nom que dans nos fables.
Ny leurs temples, ny leurs autels,
N’estoient point honneurs immortels ;
Le temps a brisé leurs images.
Quoy qu’espere la vanité,
Il n’est point d’autre éternité

Que de vivre dans tes ouvrages.

Par eux seuls la rigueur des Parques
Se rend sensible à la pitié ;
Par eux seuls de nostre amitié
Se gravent à jamais les marques,
Et dans les siecles à venir,
Où la mort mesme doit finir,
Nostre memoire reverée,
Par tout où le soleil luira,
À l’univers esgalera
Son estenduë et sa durée.


ODE.

——Plaisant séjour des ames affligées1,
——Vieilles forests de trois siecles âgées,
Qui recelez la nuit, le silence et l’effroy,
Depuis qu’en ces deserts les amoureux, sans crainte,
—————Viennent faire leur plainte,
En a t on veu quelqu’un plus malheureux que moy ?


1. La Harpe trouve ces stances, dont la première lui paroît imitée d’Ovide, d’un ton en général intéressant et d’un rhythme bien choisi. « Mais il faut prendre garde, ajoute-t-il gravement dans une note, à ces expressions équivoques, comme les amoureux sans crainte ; sans crainte se rapporte à viennent faire leur plainte, et paroît à l’oreille se rapporter d’abord à amoureux. » Voilà les auditeurs du Lycée dans une bien bonne voie !