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Préface.


pouvons-nous répondre aujourd’hui, l’omission n’étoit point du fait de Racan ; elle étoit du fait de ceux qui, à quelque titre que ce puisse être, s’étoient crus en droit de réformer ce qu’il avoit écrit.

Au reste, qu’on veuille bien reconnoitre que nous avons rempli comme nous devions le faire nos obligations d’éditeur, et nous reconnaîtrons volontiers de notre côté que les éditeurs postérieurs à 1651 (si 1651 il y a) ne sont nullement à blâmer d’avoir élagué ce qu’il peut y avoir de trop licencieux dans ces Mémoires, comme de n’avoir point donné au public, s’ils les ont connus, certains morceaux de poésie plus qu’érotiques de la jeunesse de Racan, et qu’il caressait encore dans sa vieillesse. Placé dans les mêmes conditions qu’eux, il est probable que nous eussions agi de la même manière. Racan donnoit à ses amis une grande latitude : « Faites-moi le plaisir de corriger cela, leur disoit-il familièrement ; mettez-moi ici une expression qui vaille mieux que la mienne : vous en savez tous plus que moi. » D’un autre côté, à cette époque les lecteurs s’occupaient uniquement de l’ouvrage, peu leur importait qui l’avoit composé ou qui avoit révisé ; aussi voyoit-on alors bien plus de publications anonymes que de nos jours, et les éditeurs, quelque mois même les libraires, ne se faisoient aucun scrupule de modifier suivant telle ou telle convenance l’auteur mort ou l’auteur resté modestement inconnu. Mais il en est tout autrement aujourd’hui : soit, comme nous l’avons déjà dit, par une sorte d’esprit d’observation, soit plus souvent peut-être par une vaine curio-