Il répondait au nom d’Anatole
ce bon petit porcelet de trois
semaines, qui n’avait rien de
commun avec les autres,
animaux de sa race. Il
était propre, distingué, enjoué, sentimental jusqu’au
romanesque.
Vous voyez donc qu’aucune affinité ne le liait à ses semblables.
Alors que ceux-ci
aimaient à se vautrer dans la fange
et à fourrer leur groin dans le fumier des basses-cours, Anatole n’avait d’autre pensée qu’à folâtrer dans la
campagne fleurie.
C’était le printemps… le doux animal s’arrêtait pour respirer les roses ou le jasmin ; puis il révait assis dans l’herbe tendre en suivant d’un œil attendri le vol des papillons azurés et des mouches d’or. Comme il ressemblait peu aux petits porcs que nous connaissons !.…
Aussi, faisait-il le désespoir de ses parents,
qui auraient tant souhaité voir leur enfant
crotté jusqu’aux yeux et flairant à plein nez le
purin, alors que leur enfant se conduisait en
« monsieur ».… Mais oui, dans leur idée, Anatole était un « monsieur » — autant dire un dévoyé, un égaré… Pour désigner un porc propre
et distingué, il n’y a pas d’autre mot à employer que celui de « monsieur ».…
Pour un peu, parlant de leur rejeton, les parents eussent dit « monsieur Anatole ».…