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gargantua.

quels son nom est resté attaché ; il existait aussi bien en Angleterre qu’en France, car le Gurguntius filius Beleni, qui apparaît comme le second des rois fabuleux de la Grande-Bretagne, dans la chronique de Geoffroi de Monmouth, est identique à notre Gargantua ; ce nom de Gargantua, est d’ailleurs du pur gaulois : « il est formé avec le suffixe uas-atis, d’un thème Gargant, participe présent de garg, forme intensive formée par le redoublement de la racine gar, avaler, dévorer. » Ce mot de dévorant a été d’abord sans doute l’épithète ajoutée au nom d’un dieu, épithète qui, séparée de son substantif, est devenue une divinité par elle-même. Quel était ce dieu ? Sans doute l’Hercule gaulois, appelé dévorant, parce que c’était à « ce Moloch celtique » qu’on offrait les sacrifices humains dont parle César dans un passage fameux ; & cet Hercule lui-même, ainsi que son dérivé Gargantua, n’est qu’un aspect particulier du soleil ».

M. Gaston Paris, après avoir analysé de la sorte l’ingénieuse théorie de M. Gaidoz, renouvelle l’objection faite par M. Baudry & en présente d’autres, très-dignes d’être prises en sérieuse considération :

« Que Gargantua soit le Gurgunt de la légende galloise, c’est ce qui ne paraît pas… très-assuré : en effet Gurgunt n’est représenté nulle part comme un géant, & on ne voit pas trace en Angleterre de dénominations locales populaires qui se rattachent à Gurgunt.

« Enfin qu’une épithète d’un dieu gaulois se soit conservée jufqu’à nous intacte, sans aucune modification de forme, & en gardant même, suivant M. Gaidoz, dans la forme Gargantuas, la marque du nominatif celtique, c’est ce qui paraît un peu difficile à croire ».