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chapitre vi

d’vn an leur ſembloit ſuffiſant, attendu la maturité de l’aage en laquelle ilz faiſoient nopces) pour mieulx apres le decés des mariz premiers les colloquer en ſecondes nopces : les ſecondes, à ceulx qui vouldroient multiplier en enfans : les brehaignes, à ceulx qui n’en appeteroient : & les prendroient pour leurs vertus, ſçauoir, bonnes graces, ſeulement en conſolation domeſticque, & entretenement de meſnaige. Les preſcheurs de Varenes (diſt Panurge) deteſtent les ſecondes nopces, comme folles & deſhonneſtes. Elles ſont (reſpondiſt Pantagruel) leurs fortes fiebures quartaines. Voire (diſt Panurge) & à frere Enguainnant auſſi, qui en plain ſermon preſchant à Parillé, & deteſtant les nopces ſecondes, iuroit, & ſe donnoit au plus viſte Diable d’enfer, en cas que mieulx n’aymaſt depuceller cent filles[1], que biſcoter vne vefue. Ie trouue voſtre raiſon bone & bien fondée. Mais que diriez vous, ſi ceſte exemption leurs eſtoit oultroyée, pour raiſon que tout le decours d’icelle prime année, ilz auroient tant taloché leurs amours de nouueau poſſedez (comme c’eſt l’æquité & debuoir) & tant eſgoutté leurs vaſes ſpermaticques, qu’ilz en reſtoient tous effilez, tous euirez, tous eneruez, & flatriz. Si que aduenent le iour de bataille plus toſt ſe mettroient au plongeon comme canes, auecques le baguaige, que auecques les combatans & vaillans champions on lieu on quel par Enyo eſt meu le hourd, & ſont les coups departiz. Et ſoubs l’eſtandart de Mars ne frapperoient coup qui vaille. Car les grands coups auroient ruez ſoubs les courtines de Venus s’amie. Qu’ainſi ſoit nous voyons encores maintenant entre autres reliques & monumens d’antiquité, qu’en toutes bonnes maiſons apres ne ſçay quantz iours l’on enuoye ces nouueaux mariez veoir leur

  1. Depuceller cent filles. « A Tivoli prêchait un frère de peu de réflexion, qui, dans un beau mouvement contre l’adultère, s’écria : « C’est un péché si horrible, que j’aimerais mieux connaître dix vierges qu’une seule femme mariée. » (Les Contes de Pogge, XXIV, éd. Lemerre)