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Continuation du marché entre Panurge & Dindenault.

Chapitre VII.


Mon amy (reſpondit le marchant) noſtre voiſin ce n’eſt viande, que pour Roys & Princes. La chair en eſt tant delicate, tant ſauoureuſe, & tant friande que c’eſt baſme. Ie les ameine d’vn pays, on quel les pourceaulx (Dieu ſoit auecques nous) ne mangent que Myrobalans. Les truyes en leur geſine (ſaulue l’honneur de toute la compaignie) ne ſont nourriez que de fleurs d’orangiers. Mais (diſt Panurge) vendez m’en vn, & ie vous le payeray en Roy, foy de pieton. Combien ? Noſtre amy (reſpondit le marchant) mon voiſin, ce ſont moutons extraictz de la propre race de celluy qui porta Phrixus & Hellé, par la mer dicte Helleſponte. Cancre (diſt Panurge) vous eſtez clericus vel adiſcens[1]. Ita, ſont choux (reſpondit le marchant) vere ce ſont pourreaux. Mais rr. rrr. rrrr. Ho Robin rrrrrrrr. Vous n’entendez ce languaige. A propous. Par tous les champs es quelz ilz piſſent, le bled y prouient comme ſi Dieu y euſt piſſé[* 1]. Il n’y fault aultre marne, ne fumier. Plus y a. De leur

  1. Si Dieu y euſt piſſé. c’eſt vne maniere de parler vulgaire en Paris, & par toute France entre les ſimples gens, qui eſtiment tous les lieux auoir eu particuliere benediction, esquelz noſtre ſeigneur auoit faict excretion de vrine, ou autre excrement naturel, comme de la ſaliue eſt eſcript Ioannis 9. Lutum fecit ex ſputo
  1. Clericus vel adiſcens. « Clerc ou étudiant. » — « Dindenault, jaloux de montrer sa science, observe Burgaud des Marets, dit que les mots latins ita et vere (oui, vraiment) signifient choux, poireaux. » Il est difficile en effet d’expliquer autrement ce passage ; mais il doit y avoir quelque jeu de mots que nous ne comprenons plus. Vere fait probablement allusion aux poireaux qui sont verts.